Benoît Géhanne

– Sans parcelle 2023

Pour son installation dans le grand hall de la Brasserie, Géhanne part d’une pièce d’archéologie industrielle, une ancienne machine d’embouteillage de la brasserie laissée dans un endroit central du hall. C’est un élément non seulement étrange, mais aussi aliénant, dont le bon fonctionnement est d’abord difficile à cerner. Quelque part entre un robot à tentacules et une soucoupe volante, cet objet semblait à Géhanne sortir tout droit d’un film de science-fiction des années 1950.

Géhanne poursuit cette tendance dans tous les éléments qu’il ajoute. Ce faisant, il s’inspire non seulement de la salle ou du paysage de Watou et de son architecture industrielle en particulier. Une chanson de Beck (Waitin’ for a Train : I’m an alien from another sphere. The thing I like about the earth is the range of colours…) ou un texte de Mike Kelley, Ufology (2004), sur les ovnis laissent également leur empreinte.

Le long du mur est accrochée une série de quatre grandes peintures métalliques, chacune composée de quatre parties. Comme un puzzle, elles reconstituent une vision particulière de Watou grâce à des enregistrements photographiques de toits, de silos ou de hangars interagissant avec des formes peintes abstraitement.

Une série de sculptures colorées «instables» ont été installées dans la pièce, poursuivant l’enregistrement photographique fragmenté de Watou. Dans ces sculptures, l’accent est mis sur les marges et les vides, les architectures fonctionnelles et techniques, ou les infrastructures. Les sculptures semblent toutes inviter à être manipulées ou du moins porter en elles la possibilité d’un mouvement. Comme la partie machine incluse de façon harmonieuse dans cette composition, leur fonctionnement est difficile à déterminer. Elles ont des roues, ressemblent à des structures de table suspendues ou se connectent au plafond de la pièce.

Pour lire ces éléments, il faut souvent adopter une position inhabituelle. En fait, toute reconstruction finale ou signification que le visiteur déduit est tout aussi légitime. Ce qui est particulièrement important, c’est l’idée de retracer un langage visuel inconnu, perdu ou nouvellement découvert. Grâce à l’occasion donnée de déplacer le regard, de faire passer l’attention du familier à l’étrange, la désorientation initiale ouvre la voie à une lecture active de Watou. Il ne s’agit plus tant de reconnaître que d’essayer de savoir, de comprendre et donc de rencontrer.

1973, Cherbourg, France

Vit et travaille à Saint-Denis,

Le travail de Benoît Géhanne se déploie en séries aux travers de différentes pratiques : tableaux, volumes, dessins, photographies, installations. À partir de document, d’archives, ou encore de repérages photographiques, il procède par prélèvement, par découpage pour extraire des fragments. Ces morceaux, abstraits et rapportés, constituent alors la matrice des pièces et du travail d’atelier. En détachant des portions d’images, en éludant leurs référents, en les autonomisant, Benoît Géhanne sonde la résistance des formes. Il éprouve les habitudes d’un monde où l’acte de voir est directement lié à l’appropriation et à l’identification.

Ses pièces interrogent in fine la manière avec laquelle nous sommes amenés à regarder, à envisager toute chose.

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